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Nos souvenirs ne sont pas fidèles

L’oubli n’est pas le seul danger que risquent nos souvenirs, l’infidélité les guette parfois, et de manière insidieuse. Ce phénomène naturel prend parfois une dimension tragique lors d’affaires judiciaires. Si le fait est courant aux USA depuis les années 1980-1990, il commence à envahir nos prétoires, avec des procès pour implantation de faux souvenirs. Le monde judiciaire a lui même prêté le flanc à de telles situations au cours desquelles un interrogatoire mal conduit par un policier, un gendarme ou un magistrat, influençait le témoignage d’un témoin, aboutissant à l’inculpation puis la condamnation d’un innocent. De là l’appétence américaine pour les analyses scientifiques des fibres, des poils, de l’ADN. Cette décrédibilisation des témoignages oculaires a pour avatar l’invasion de nos écrans par les séries sur les exploits des experts de la Police scientifique.

Il peut aussi s’agir de psychothérapeutes dont les questions maladroites créeront un faux souvenir d’inceste ou de maltraitance. Plus récemment, on a même découvert que d’habiles escrocs parvenaient à fabriquer chez des personnes de faux souvenirs traumatisants, l’escroc se proposant ensuite de soulager psychologiquement (et financièrement) leurs victimes. Il existe même une association Alerte faux souvenirs induits (AFSI) pour aider ces personnes ou leur famille à se défendre lorsque le pot aux roses est dévoilé.

Notre mémoire n’est pas fiable

Des psychologues ont pu expérimentalement modifier des souvenirs. Elizabeth Loftus et son équipe ont ainsi réalisé plusieurs expériences troublantes lors desquelles ils ont convaincu environ un quart des participants qu’enfants, ils s’étaient perdus dans une galerie marchande ou bien qu’ils étaient allés dans un parc d’attraction, ce qui était totalement faux.

Lors d’autres expériences, ils ont tenté de comprendre le mécanisme de modification des souvenirs. Les procédures les plus fréquentes sont : l’information erronée ultérieure, la question inductrice, le poids de l’autorité. Pour prouver le rôle d’une information erronée apportée a postériori, ils ont projeté à des volontaires des diapositives montrant des accidents de voiture. Ensuite, des informations supplémentaires ont été apportées à ces personnes sous la forme d’un compte-rendu de l’accident. L’astuce était de glisser parfois des informations fausses. Par exemple, sur l’une des diapositives, l’accident avait eu lieu à un croisement comportant le panneau « Stop », mais lors du commentaire ultérieur, on indiquait la présence d’un « Céder le passage » à la place du « Stop ». Entre 15 à 20 % des sujets affirmèrent plus tard que la scène comportait le panneau « Céder le passage ». Le plus terrifiant est que leur degré de confiance vis-à-vis de leur réponse erronée était très important : ils affirmaient mordicus que le panneau était un « Céder le passage ».

Bien sûr, 80 à 85 % des sujets n’ont pas été influencés, ce qui est plutôt rassurant, mais il est inquiétant de noter la facilité avec laquelle une simple phrase a pu modifier la nature des souvenirs, ce qui, dans une situation judiciaire aurait eu de graves conséquences. L’idée que dans la vie réelle, et pour un accident de circulation véritable, le cerveau serait plus rigoureux et moins influençable, ne correspond pas à ce que l’on observe : en effet, le contexte émotionnel d’un accident réel gênera en fait l’enregistrement initial ou effacera ultérieurement certains détails qui pourront être remplacés par d’autres en fonction des questions posées aux témoins. En fait, les deux meilleures questions sont « Racontez » puis « Précisez » car toute autre question risque d’infiltrer une information erronée dans le souvenir de la personne interrogée.

Essayez vous-même !

Les chercheurs Deese, Roediger et McDermott ont mis au point un paradigme assez simple, et que j’utilise souvent lors de mes conférences sur la mémoire. Vous pouvez tenter l’expérience vous-même auprès d’une dizaine d’amis. Bien sûr, il ne faut surtout pas leur dire que vous allez modifier leur souvenir mais simplement que vous allez tester leur mémoire.

Il s’agit de leur lire lentement une liste de mots, par exemple : « repos, lit, rêve, sieste, réveil, torpeur, assoupissement, bâillement, couverture, ronflement, fatigué, éveillé, somme, repos, pyjama ». Demandez-leur ensuite d’écrire sur une feuille de papier les mots qu’ils auront retenus. Personne ne retrouvera la totalité des 15 mots, et vous observerez qu’entre 20 à 40 % des individus écriront le mot sommeil. Ce qui est troublant, c’est que si vous dites « Tiens, certains d’entre vous ont oublié le mot sommeil », quelques personnes iront même jusqu’à affirmer qu’en effet la liste comportait le mot sommeil. Même après avoir juré que vous n’avez jamais prononcé le mot sommeil dans la liste, il y aura des irréductibles pour vous soupçonner de mentir. Il est facile de comprendre ce qui s’est passé, les mots de la liste évoquaient tous le champ sémantique du sommeil, ce qui a activé le réseau aboutissant à ce mot, et fort logiquement des personnes ont cru l’avoir entendu. L’étonnant est la force de conviction de ceux qui maintiennent malgré tout qu’il était dans la liste. Comme quoi, les accents de vérité ne prouvent pas la véracité d’une chose, mais simplement que vous croyez dur comme fer à ce que vous pensez !
Source : Bernard Croisile. Tout sur la mémoire. Éditions Odile Jacob (2009).

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