Au bureau, les performances cognitives varient-elles selon la température ?

Comme le soulignent Tom Y. Chang (chercheur à la Marshall School of Business-Californie) et Agne Kajackaite (chercheuse au Berlin Social Center), s’il y a des débats passionnés pour savoir si les femmes préfèrent ou non des températures intérieures plus élevées que les hommes, aucune étude n’avait jusqu’à présent exploré le lien entre les variations de température et les performances cognitives selon le sexe. Ces deux chercheurs ont alors souhaité combler cette lacune en menant une expérience à grande échelle sur plus de 500 personnes. Très précisément, 542 étudiants de Berlin (âge moyen = 24,6 ans) ont été recrutés, dont 41,14% de femmes. Bien évidemment, s’il a été pratique de solliciter ces sujets, ceux-ci ne sont pas représentatifs de l’ensemble de la population en termes d’âge et de niveau d’instruction.
Les participants ont été invités à effectuer tout un ensemble de tâches de réflexion mathématique, verbale et cognitive. Dans la première, ils devaient additionner mentalement cinq nombres à deux chiffres. 50 opérations de ce type étaient prévues et ils avaient 5 minutes pour en réaliser le plus possible. Dans la deuxième, les personnes devaient, là encore en 5 minutes, construire le plus de mots (allemands) avec les dix lettres de départ (A, D, E, H, I, N, R, S, T, U). Dans la dernière tâche, il s’agissait de répondre, toujours dans le même temps, à des questions où la réponse intuitive est la mauvaise réponse. Par exemple : « Une batte et une balle coûtent au total 1,10 euros. Le bâton coûte 1 euro de plus que le ballon. Combien coûte la balle ? »
Au cours des différentes sessions de l’expérience, pendant que les étudiants effectuaient ces divers exercices, les chercheurs ont fait varier la température de 16,19 à 32,57°C. Quels ont été les effets de ces variations de chaleur sur les performances cognitives des hommes et des femmes ?
Des écarts de performances ont bien été relevés, puisque à des températures plus élevées, les femmes obtiennent de meilleurs résultats aux tâches mathématique et verbale, tandis que l’effet inverse est observé chez les hommes. Avec l’augmentation de la chaleur, les femmes ont répondu correctement à 1.76% de questions mathématiques et à 1.03% de questions verbales en plus ; alors que les taux de réponses correctes ont baissé chez les hommes dans ces mêmes tâches (respectivement de 0.63% et 0.6%). Point important : même si les différences ne sont pas statistiquement significatives, l’augmentation de la performance féminine à des températures élevées est nettement plus importante que la diminution de la performance masculine. En revanche, pour les deux sexes, la température n’a pas eu d’impact sur leur taux de réussite à la tâche de réflexion cognitive.
Dans l’ensemble, ces résultats semblent indiquer que plus la pièce est chaude, meilleures sont les performances cognitives des femmes ; alors que les hommes seraient plus productifs à des températures moins élevées.
Cela ne va pas être facile de régler le thermostat au bureau !
Source : Chang TY, Kajackaite A. « Battle for the thermostat : Gender and the effect of temperature on cognitive performance », in PLoS ONE, mai 2019