Et s'il fallait courir pour soigner son cerveau ?

Parmi ses nombreux bienfaits, on sait que l’exercice physique favorise la neurogénèse (la fabrication de nouveaux neurones). De plus, même si leur rôle dans le retardement de la neurodégénérescence n’est pas encore clairement établi, les facteurs de croissance nerveuse (résumés sous l’acronyme VGF), précurseurs de neuropeptide sont régulés à la hausse pendant un effort physique. C’est précisément sur ces derniers que Matias Alvarez-Saavedra et les membres de son équipe se sont focalisés pour leur étude.
Pour étudier les mécanismes reliant l’exercice physique à la protection, voire à la réparation neuronale, ils ont utilisé des souris génétiquement modifiées dont la taille du cervelet a été réduite (d’un tiers par rapport à celle de leurs congénères de contrôle), ce qui a entrainé chez elles des difficultés motrices et leur a conféré une espérance de vie réduite (entre 25 et 45 jours). Une fois ces faits établis, les scientifiques ont offert à ces souris cérébro-lésées un accès illimité à une roue qui tourne. Et les résultats sont étonnants !
En effet, les souris actives ont vu leur vie prolongée au-delà de 1 an d’âge. Parallèlement à leur survie, la course a amélioré leurs fonctions motrices et leur équilibre. Les observations du cerveau des rongeurs (qui avaient fait de l’exercice) montrent une augmentation frappante de la myélinisation ; la myéline étant cette substance à base de lipide qui enrobe la plupart des fibres nerveuses et permet aux nerfs de transmettre efficacement et rapidement les divers messages. Par conséquent, les circuits endommagés chez les souris (amputées d’une partie de leur cervelet) fonctionnaient mieux grâce à l’exercice physique. En revanche, dès que les rongeurs arrêtaient de courir (dans certaines expériences, les scientifiques ont retiré la roue), ce processus « réparateur » a été interrompu. Les VGF produits pendant les efforts physiques seraient à l’origine de ce soin des zones endommagées du cerveau.
Dans leur ensemble, les résultats de cette étude suggèrent que grâce aux VGF, « les neurones cérébelleux endommagés peuvent être sensiblement secourus par une augmentation de la myélinisation, en utilisant un mécanisme endogène de réparation du cerveau ». Cela éclaire déjà de nouvelles voies pour traiter potentiellement certaines pathologies neuronales, même si de nouvelles investigations sont nécessaires. En attendant, faisons de l’exercice !
Source : Matías Alvarez-Saavedra, Yves De Repentigny, Doo Yang, Ryan W. O’Meara, Keqin Yan, Lukas E. Hashem, Lemuel Racacho, Ilya Ioshikhes, Dennis E. Bulman, Robin J. Parks, Rashmi Kothary, David J. Picketts, Voluntary Running Triggers VGF-Mediated Oligodendrogenesis to Prolong the Lifespan of Snf2h-Null Ataxic Mice, in Cell Reports, vol.17, 11 octobre 2016