Et si l’empathie améliorait notre créativité ?
Les compétences dites « non académiques » sont de plus en plus recherchées, sollicitées et encouragées en milieu professionnel. Parmi elles, les compétences sociales et émotionnelles. Cette prise de conscience n’est d’ailleurs pas récente, puisque comme le rappellent les auteurs de la présente étude, John Dewey, psychologue et philosophe américain majeur de la première partie du XXème siècle, avait compris très tôt l’intérêt de les enseigner : « Il n'y a pas d'éducation lorsque les idées et les connaissances ne se traduisent pas en émotion, intérêt et volonté. » Presque un siècle plus tard, l’équipe de recherche de l’Université de Cambridge (Angleterre) s’est posé la question de savoir si l’enseignement de l’empathie pourrait être bénéfique pour les apprentissages et plus spécifiquement pour la créativité.
Depuis une vingtaine d’années, des recherches ont déjà mis en lumière l’importance des compétences sociales et émotionnelles liées à l’empathie. Celle-ci revêt généralement deux formes : émotionnelle (ressentir les mêmes émotions qu’autrui) et cognitive (appréciation, compréhension du point de vue, de la situation d’autrui, sans qu’il y ait nécessairement une implication émotionnelle). Avec cette double nature, l’empathie peut conduire à des actions pour améliorer une situation (par exemple : consoler une personne ou la mettre dans les meilleures dispositions avant un examen important). Chez le jeune enfant, l’empathie se développe en général vers 18-24 mois. Considérant qu’elles possèdent des traits similaires, l’équipe de chercheurs a souhaité prouver les bienfaits de l’empathie sur la créativité.
Quels seraient les points communs à l’empathie et à la créativité ? A cette question, les auteurs répondent : une ouverture d’esprit, une absence de jugement, un ego flexible, ou encore un désir de travailler au-delà des limites de soi.
Pour tester leur hypothèse, l’équipe de scientifiques a étudié l’impact de l’enseignement de l’empathie sur les compétences sociales et émotionnelles de la créativité en récoltant des données auprès d’élèves en section Design et Technologie dans trois écoles du centre de Londres. Dans l’une d’elles, en début et en fin d’année scolaire, le niveau de créativité des élèves (âgés de 13 à 14 ans) a été évalué avec le test de Torrance de pensée créative (TTCT). Dans la deuxième école, les élèves ont passé le même test, mais ont suivi en parallèle des cours traditionnels, des cours de créativité différents appelés Designing Our Tomorrow (DOT), qui implique l’enseignement de l’empathie. Dans la troisième école, des élèves de 11-12 ans ont uniquement suivi les cours DOT et ont été interrogés sur leurs expériences d’apprentissage créatives.
Concrètement, les élèves inclus dans cette recherche ont dû relever ce défi : concevoir un pack de traitement de l’asthme pour les enfants de 6 ans et moins. Les élèves qui ont suivi le cursus DOT ont alors eu accès à des « outils empathiques », comme une vidéo montrant un enfant en pleine crise, des données sur les défauts des inhalateurs, sur le nombre de décès au Royaume-Uni, etc. On leur a demandé d’explorer les problèmes et de tester leurs idées de conception par l’intermédiaire de jeux de rôles (prendre la place du patient, de l’aidant, du médecin …).
Sur le plan quantitatif, les résultats indiquent que les cours DOT ont permis aux élèves d’obtenir de meilleurs résultats au TTCT. Bien meilleurs même, puisque en fin d’année, leurs scores de créativité étaient en moyenne 78% plus élevés que celles des élèves qui avaient suivi le parcours classique. C’est notamment probant dans les catégories « expressivité émotionnelle » et « ouverture d’esprit ». Cela démontre que l’intégration de l’empathie dans les cours a amélioré la créativité. Quant aux entretiens qualitatifs, ils ont eux-aussi révélé les bienfaits de la méthode DOT. Les propos recueillis illustrent cela à merveille. En voici deux exemples :
- Cela a montré comment non seulement la personne asthmatique est affectée, mais aussi les gens qui l'entourent, comme leurs parents, frères, sœurs, vous savez. Et cela a montré comment les besoins de chacun, doivent être satisfaits et justes. . . oui, pensez à eux aussi.
- C'était vraiment important. . . se mettre à la place de quelqu'un d'autre. . . vous avez compris ce que ressent le parent, ce que ressent l'enfant et ce que vous pouvez faire pour l'aider. Et cela vous aide à générer des idées. . . . parce que vous comprenez en quelque sorte ce que ressent l'enfant et que vous savez en quelque sorte quels sont ses besoins.
H. Demetriou et B. Nicholl, co-auteurs de l’étude précisent : « Nous avons clairement éveillé quelque chose chez ces élèves en les encourageant à réfléchir aux pensées et aux sentiments des autres. La recherche montre non seulement qu'il est possible d'enseigner l'empathie, mais que ce faisant, nous soutenons le développement de la créativité des enfants et leur apprentissage plus large. »
Pour eux, il est nécessaire de former des « apprenants émotionnellement intelligents ».
Depuis une vingtaine d’années, des recherches ont déjà mis en lumière l’importance des compétences sociales et émotionnelles liées à l’empathie. Celle-ci revêt généralement deux formes : émotionnelle (ressentir les mêmes émotions qu’autrui) et cognitive (appréciation, compréhension du point de vue, de la situation d’autrui, sans qu’il y ait nécessairement une implication émotionnelle). Avec cette double nature, l’empathie peut conduire à des actions pour améliorer une situation (par exemple : consoler une personne ou la mettre dans les meilleures dispositions avant un examen important). Chez le jeune enfant, l’empathie se développe en général vers 18-24 mois. Considérant qu’elles possèdent des traits similaires, l’équipe de chercheurs a souhaité prouver les bienfaits de l’empathie sur la créativité.
Quels seraient les points communs à l’empathie et à la créativité ? A cette question, les auteurs répondent : une ouverture d’esprit, une absence de jugement, un ego flexible, ou encore un désir de travailler au-delà des limites de soi.
Pour tester leur hypothèse, l’équipe de scientifiques a étudié l’impact de l’enseignement de l’empathie sur les compétences sociales et émotionnelles de la créativité en récoltant des données auprès d’élèves en section Design et Technologie dans trois écoles du centre de Londres. Dans l’une d’elles, en début et en fin d’année scolaire, le niveau de créativité des élèves (âgés de 13 à 14 ans) a été évalué avec le test de Torrance de pensée créative (TTCT). Dans la deuxième école, les élèves ont passé le même test, mais ont suivi en parallèle des cours traditionnels, des cours de créativité différents appelés Designing Our Tomorrow (DOT), qui implique l’enseignement de l’empathie. Dans la troisième école, des élèves de 11-12 ans ont uniquement suivi les cours DOT et ont été interrogés sur leurs expériences d’apprentissage créatives.
Concrètement, les élèves inclus dans cette recherche ont dû relever ce défi : concevoir un pack de traitement de l’asthme pour les enfants de 6 ans et moins. Les élèves qui ont suivi le cursus DOT ont alors eu accès à des « outils empathiques », comme une vidéo montrant un enfant en pleine crise, des données sur les défauts des inhalateurs, sur le nombre de décès au Royaume-Uni, etc. On leur a demandé d’explorer les problèmes et de tester leurs idées de conception par l’intermédiaire de jeux de rôles (prendre la place du patient, de l’aidant, du médecin …).
Sur le plan quantitatif, les résultats indiquent que les cours DOT ont permis aux élèves d’obtenir de meilleurs résultats au TTCT. Bien meilleurs même, puisque en fin d’année, leurs scores de créativité étaient en moyenne 78% plus élevés que celles des élèves qui avaient suivi le parcours classique. C’est notamment probant dans les catégories « expressivité émotionnelle » et « ouverture d’esprit ». Cela démontre que l’intégration de l’empathie dans les cours a amélioré la créativité. Quant aux entretiens qualitatifs, ils ont eux-aussi révélé les bienfaits de la méthode DOT. Les propos recueillis illustrent cela à merveille. En voici deux exemples :
- Cela a montré comment non seulement la personne asthmatique est affectée, mais aussi les gens qui l'entourent, comme leurs parents, frères, sœurs, vous savez. Et cela a montré comment les besoins de chacun, doivent être satisfaits et justes. . . oui, pensez à eux aussi.
- C'était vraiment important. . . se mettre à la place de quelqu'un d'autre. . . vous avez compris ce que ressent le parent, ce que ressent l'enfant et ce que vous pouvez faire pour l'aider. Et cela vous aide à générer des idées. . . . parce que vous comprenez en quelque sorte ce que ressent l'enfant et que vous savez en quelque sorte quels sont ses besoins.
H. Demetriou et B. Nicholl, co-auteurs de l’étude précisent : « Nous avons clairement éveillé quelque chose chez ces élèves en les encourageant à réfléchir aux pensées et aux sentiments des autres. La recherche montre non seulement qu'il est possible d'enseigner l'empathie, mais que ce faisant, nous soutenons le développement de la créativité des enfants et leur apprentissage plus large. »
Pour eux, il est nécessaire de former des « apprenants émotionnellement intelligents ».
Source : Helen Demetriou, Bill Nicholl. « Empathy is the mother of invention: Emotion and cognition for creativity in the classroom », in Improving Schools, février 2021 // Dewey, J. (1933). How We Think: A Restatement of the Relation of Reflective Thinking to the Educative Process. Boston, MA: D.C. Heath & Co Publishers