Le cerveau des jeunes d'aujourd'hui est-il différent ?

Le directeur du Laboratoire de psychologie du développement et de l'éducation de l'enfant du CNRS-La Sorbonne précise d'entrée que les natifs du numérique ont développé des aptitudes cérébrales en termes de vitesse et d'automatismes, au détriment du raisonnement et de la maîtrise de soi. Cette "tension" entre la rapidité de décision et la prise de recul nécessaire au raisonnement se joue essentiellement dans une zone du cerveau, le cortex préfontal. C'est à ce niveau qu'a lieu l'arbitrage entre deux systèmes du cerveau qui sont complémentaires. Le premier système, de plus en plus sollicité par les écrans, est rapide, automatique et intuitif (O. Houdé emploie l'expression "TGV cérébral" pour le trajet œil-pouce). Le deuxième système est plus lent et réfléchi. Selon le psychologue, pour cette génération Z, le cortex préfontal doit être le lieu de la "résistance cognitive". L'intelligence se joue dans cette lutte, dans cette synthèse personnelle. Il s'agit de faire prendre conscience aux enfants et adolescents qu'il faut parfois prendre du temps pour raisonner, pour penser et, au contraire, ne pas continuellement agir intuitivement et trop rapidement. Il faut résister à la tentation de cliquer frénétiquement sur une autre information, sur une autre application, et reprendre le contrôle de l'écran pour s'octroyer davantage de temps pour la réflexion.
O. Houdé précise que la maturation de ce processus où le cerveau résiste à lui-même se fait tout au long du développement de l'enfant et de l'adolescent. C'est pourquoi il préconise un apprentissage et un entraînement scolaire pour accompagner les "mutations" cérébrales entrainées par le numérique et pour apprendre à résister à l'envie de vitesse. Même si ses applications sont encore à penser, il est important de prendre en compte le rôle de ce qu'il nomme "la pédagogie du contrôle cognitif" pour le raisonnement, la lecture, les mathématiques, etc.
Au-delà de l'école, O. Houdé voit également une utilité sociale dans cet apprentissage de la résistance cognitive, qui favoriserait la tolérance en favorisant notamment le respect du point de vue d'autrui.
Source : http://www.sciencesetavenir.fr/sante/20150212.OBS2324/generation-z-le-cerveau-des-enfants-du-numerique.html