Les chats sont-ils de bons physiciens ?

Dans leurs travaux précédents, S. Takagi et ses collègues du Département de Psychologie de l’Université de Kyoto (Japon) ont déjà mis en lumière le fait que les chats pouvaient prédire, en fonction de ce qu’ils entendaient, la présence d’un objet absent. Cette capacité à comprendre le principe de cause (bruit) à effet (présence matérielle) repose sur la finesse de leurs facultés auditives. Pour cette présente étude, les chercheurs ont souhaité également tester la compréhension de la gravité chez ces félins.
Ils ont alors utilisé une procédure dite de « violation des attentes » pour premièrement, observer si le chat utilisait une règle de causalité pour déduire la présence d’un objet invisible, en entendant un bruit émis à l’intérieur d’une boîte opaque qu’un expérimentateur secouait. Deuxièmement, il s’agissait de voir si l’animal était capable de prévoir l’apparition de l’objet lors du retournement de la boîte. Dans deux conditions expérimentales (congruentes), les lois de la physique étaient respectées : si pendant la phase d’agitation de la boîte, un son se faisait entendre, lors de la phase de retournement de celle-ci, un objet (un hochet) tombait. A l’inverse, si aucun son ne « sortait » de la boîte, aucun objet n’en « sortait ». Bien évidemment, les conditions non congruentes (celles qui violent les attentes) sont les plus intéressantes à étudier.
30 chats domestiques (moyenne d’âge = 2,9 ans ; 13 mâles et 17 femelles) ont participé à cette expérience. C’est lors des conditions non conformes aux lois de la physique que les scientifiques ont été particulièrement attentifs aux comportements des animaux. Comment ont-ils réagi lorsqu’ils avaient entendu un bruit dans la boîte et qu’ils découvraient qu’aucun objet n’y était logé ; ou bien lorsqu’ils s’apercevaient que quelque chose s’y trouvait, alors qu’ils n’avaient pourtant perçu aucun son ? Les chercheurs ont émis l’hypothèse que dans ces deux situations expérimentales non congruentes, les chats regarderaient plus longtemps la boîte lors de la phase de retournement, ce qui indiquerait leur surprise, leur incompréhension.
De manière logique, les résultats indiquent que les chats ont porté leur regard de manière plus durable sur la boîte lorsque l’expérimentateur la secouait et qu’un bruit était émis. Cela conforterait le fait que ce félin a bien utilisé une loi de la physique (causale-logique) pour déduire la présence (ou l’absence) d’un objet. De même, dans les situations incongrues, les chats ont regardé plus longtemps la boîte, comme s’ils se questionnaient sur la présence ou bien l’absence de l’objet, en non-conformité avec le son entendu ou non précédemment. L’hypothèse des chercheurs semble donc valide et ils n’hésitent d’ailleurs pas à déclarer que les chats ont « une connaissance rudimentaire de la gravité ».
Selon les auteurs, l’esprit de chasse de ces animaux pourrait expliquer cette capacité à inférer la présence d’un objet à partir d’un son. En effet, S. Takagi explique que « les chats de chasse doivent souvent déduire des sons uniquement la position et la distance de leur proie. »
Source : S. Takagi et coll. « There’s no ball without noise : cat’s prediction of an object from noise », in Animal Cognition, sept. 2016 Futura Sciences : https://www.futura-sciences.com/sciences/actualites/science-decalee-science-decalee-chats-comprennent-lois-physiques-base-63306/