Nos neurones sont-ils menacés par la télévision ?

Dans le cadre de cette étude, les habitudes physiques et télévisuelles de 3247 adultes (dont 54.5 % de femmes) âgés de 18 à 30 ans (moyenne d’âge : 25.1) ont été recensées et analysées pendant vingt-cinq ans (du 25 mars 1985 au 31 août 2011). Au début de cette recherche, chez ces participants inscrits au CARDIA (Coronary Artery Risk Development in Young Adults), 92.9 % avaient terminé au moins l’école secondaire. Chaque personne a été initialement interrogée, puis recontactée tous les deux à cinq ans en moyenne pour répondre à un questionnaire. Ces personnes ont au final été classées en deux groupes en fonction de leurs pratiques télévisuelles : les téléspectateurs assidus (plus de 3 heures de télévision par jour) et les téléspectateurs modérés (mois de 3 heures par jour). Leurs fonctions cognitives ont été évaluées avec le DSST (Digit Symbol Substitution Test), le test de Stroop et le RAVLT (Rey Auditory Verbal Learning Test).
Les résultats et analyses (réalisées entre juin 2014 et avril 2015) montrent premièrement que les téléspectateurs assidus pendant 25 ans (10.9 %) sont plus susceptibles d’avoir une mauvaise performance aux tests cognitifs. Deuxièmement, les participants qui ont une faible activité physique (16.3 %) réalisent de mauvaises performances au DSST. Troisièmement, par rapport aux téléspectateurs modérés qui pratiquent une activité physique régulière, les chances de réaliser de mauvaises performances cognitives sont presque deux fois plus élevées chez les téléspectateurs assidus et peu sportifs. La surconsommation télévisuelle et le manque d’activité physique représentent en fait des facteurs autonomes du déclin cognitif.
Les effets néfastes du trop grand nombre d’heures passées devant la télévision ne sont pas compensés par une activité sportive. Si vous êtes sportif, certes vous préservez davantage vos facultés cognitives par rapport aux personnes sédentaires ; mais si en parallèle, vous regardez la télévision plus de trois heures par jour, cela ne sera pas sans conséquences négatives sur votre activité intellectuelle.
Selon Michel Desmurget (Directeur de recherche à l’Inserm, au Centre de neurosciences cognitives de Lyon), plusieurs causes peuvent être avancées pour expliquer la diminution des fonctions cognitives, parmi lesquelles : le manque de stimulation (programmes télévisuels peu exigeants intellectuellement), le niveau d’anxiété chronique (programmes anxiogènes), la diminution du temps et de la qualité du sommeil, ou encore la stimulation de la consommation d’alcool et de tabac.
Le sport ne protège pas d’une surconsommation de télé. C’est certainement l’enseignement majeur de cette étude. Pour protéger nos neurones, avoir une activité physique régulière est nécessaire ; mais lâcher la télécommande l’est tout autant !
Source : T.D. Hoang et al., Effet of early adult patterns of physical activity and television viewing on midlife cognitive function, in JAMA Psychiatry vol. 73, n°1, janvier 2016.