Un vin cher est-il vraiment meilleur ?

Les travaux antérieurs de l’équipe de recherche franco-allemande (le Laboratoire de neuroscience cognitive / Economic Décision-Making group à Paris, et le Centre d’économie et de neuroscience à Bonn) ont déjà mis en avant que le prix d’un produit pouvait affecter nos attentes et influencer notre appréciation (gustative, par exemple) de celui-ci. Un vin sera jugé meilleur … que le même vin, s’il est affiché plus cher. Comment expliquer ce phénomène ? Les neurosciences ont montré que le système d’évaluation du cerveau (le cortex préfrontal médian et le striatum ventral) pouvait jouer un rôle important dans cet « effet placebo de marketing ». La présente étude s’attache donc aux mécanismes cérébraux liés à celui-ci.
Les scientifiques ont convié 30 participants (15 hommes, 15 femmes, âge moyen = 29.6 ans) à une dégustation de vin dans un scanner IRM. A plusieurs reprises, on leur a fait goûter trois vins à 12 euros. Chaque fois, un prix (faussé) du vin leur a été montré en premier (3, 6 ou 18 euros). Les participants devaient ensuite évaluer la qualité du vin sur une échelle de 1 à 9. Chaque condition expérimentale a été répétée 18 fois, mais rassurez-vous, au total, chaque personne n’a consommé que 135 ml de vin (moins d’un verre) !
Quels sont les résultats ? Comme attendu, les sujets ont déclaré que le vin le plus cher était meilleur que ceux aux prix moins élevés. Cela conforte l’hypothèse qu’un vin identique, selon les modifications de son prix, entraine des appréciations de goût différentes. Ce fait a été confirmé par les mesures de l’activité cérébrale chez les participants. En effet, les chercheurs ont constaté que lorsque les prix étaient les plus élevés, toutes les parties du cortex préfontal médian et du striatum ventral étaient actives. Le premier serait impliqué dans l’intégration de la comparaison de prix et ainsi des attentes dans l’évaluation du vin, tandis que le second se trouve au centre du système de la récompense et de la motivation. Chez le participant placé devant un vin à 18 euros, ce système s’active et augmente « artificiellement » l’expérience gustative.
Pour conclure, « l’effet placebo marketing » prouve que notre cerveau peut nous tromper en nous faisant croire qu’un goût n’est pas seulement présent dans le produit lui-même (mais dans son prix, son emballage, etc.) et la question que soulèvent finalement les auteurs est de savoir s’il est possible de rendre ce système de la récompense moins réceptif à cet effet. Cela passe certainement par une meilleure éducation au goût dès notre plus jeune âge.
Source : Liane Schmidt, Vasilisa Skvortsova, Claus Kullen, Bernd Weber, Hilke Plassmann. « How context alters value : The brain’s valuation and affective regulation system link price cues to experienced taste pleasantness ». Scientific Reports, juillet 2017